Saint-Pierre de Moissac
L'Histoire sainte racontée par les tailleurs de pierre
Le cloître et le porche de l'abbaye Saint-Pierre de Moissac constituent l'un des plus beaux témoignages de l'art roman. Inscrits au patrimoine mondial de l'UNESCO en 1998, ils nous racontent l'Histoire sainte en des termes émouvants et naïfs.
Saint-Pierre de Moissac est l'un des plus beaux et plus émouvants témoignages du renouveau de la chrétienté après l'An Mil.
Cette ancienne abbaye est située au confluent du Tarn et de la Garonne, entre Montauban et Agen, dans une région fertile et plaisante où la brique rose se marie avec le vert des feuillages.
André Larané
La petite soeur de Cluny
La légende fait remonter sa fondation à Clovis. Mais il semble que ce soit seulement à l'époque de Charlemagne que des moines s'installent en ce lieu. Ils vivent de manière assez dissipée jusqu'à ce qu'arrive à Moissac Odilon, le prestigieux abbé de Cluny, en 1045.
Il reprend les choses en main et place à la tête de l'abbaye un homme énergique, Durand de Bredon, par ailleurs évêque de Toulouse.
Ce dernier rétablit dans toute sa rigueur la règle bénédictine. Les moines alternent la prière, avec pas moins de huit offices quotidiens, et le travail manuel (copie de manuscrits, travaux agricoles et ménagers...).
L'abbaye gagne en influence et devient, avec une centaine de moines, l'un des principaux établissements de l'ordre clunisien. Elle voit affluer les dons des fidèles et peut envisager des constructions ambitieuses...
Artistes à l'oeuvre
Dans un premier temps, les moines engagent la reconstruction de leur église abbatiale.
De celle-ci, il ne reste plus grand-chose, la nef ayant été restaurée en style gothique languedocien au XVe siècle, à la fin du Moyen Âge. Les murs sont peints selon la tradition médiévale.
Dans une chapelle latérale, sur un sarcophage paléo-chrétien, on peut voir le chrisme, vieux symbole chrétien qui associe les deux premières lettres grecques de Christ (X et P) ainsi que les lettres alpha et oméga, qui évoquent «le commencement et la fin» des temps.
Quelques années plus tard, en 1100, est construit le cloître, chef d'oeuvre de l'art roman encore à peu près intact aujourd'hui.
Le maître d'oeuvre et les ouvriers sont des Languedociens qui vont de ville en ville. Ils reproduisent peu ou prou les mêmes techniques d'un chantier à l'autre et échangent leur expérience avec les équipes concurrentes.
On retrouve leur inspiration dans des constructions beaucoup plus tardives. Ainsi ne peut-on manquer d'être frappé par les similitudes entre le cloître de Moissac et celui des Jacobins, à Toulouse, quoique la décoration du premier soit autrement plus riche.
Les quatre galeries du cloître sont bordées de 76 piliers simples ou doubles, dont chacun est surmonté d'un chapiteau sculpté.
La majorité, au nombre d'une cinquantaine, sont historiés : ils racontent un épisode de l'Ancien ou du Nouveau Testament. Par exemple, comme ci-dessus, l'histoire du prophète Daniel, qui fut jeté dans la fosse aux lions par le redoutable roi Balthazar.
Le double chapiteau ci-contre raconte en plusieurs épisodes la mort de Saint Jean-Baptiste, sacrifié par le roi Hérode, à la demande de sa belle-fille Salomé.
On voit ici le roi à la table du festin, l'épée levée en symbole de pouvoir, ordonnant l'exécution du prophète.
D'autres chapiteaux évoquent l'histoire des saints. Ainsi voit-on Saint Martin partager son manteau avec un pauvre dans l'illustration en tête de l'article.
Les chapiteaux non historiés sont décorés de motifs végétaux ou animaux plus moins fantaisistes qui évoquent la Création.
Ceux-là puisent parfois leur inspiration dans l'art antique.
Il en est aussi, comme ci-contre, qui présentent des entrelacs inspirés de l'art mozarabe développé de l'autre côté des Pyrénées par les chrétiens de l'Andalousie musulmane.
Le Christ en majesté
Une vingtaine d'années après le cloître, les moines de Moissac lancèrent la construction du grand portail de l'abbatiale. Il constitue lui aussi un exceptionnel témoignage de la sculpture romane.
Son tympan, au-dessus des portes, présente le Christ en majesté, entouré des quatre symboles des évangélistes et de vingt-quatre Anciens. La scène est inspirée d'un texte du Nouveau Testament, l'Apocalypse de Saint Jean.
Notons encore, sur le côté du porche, une belle évocation de la fuite de la Sainte Famille en Égypte.
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