Marché de l'art : "Il faut avoir du Chinois"
Par Christelle Granja (LEXPRESS.fr), publié le 24/05/2011 
  A Hong-Kong, lors une vente de la  société Christie's, organisée en décembre 2008. 
REUTERS/ Bobby Yip
Ce 22 mai, une oeuvre de l'artiste Qi Baishi était vendue pour 46,5 millions d'euros: un record pour une peinture contemporaine chinoise, révélatrice de la nouvelle place du géant asiatique sur le marché de l'art. Quelques pistes d'analyse avec Gérard Sousi, universitaire spécialiste de l'art contemporain.
La Chine s'est hissée à la première place du marché  des enchères de l'art en 2010, selon le classement d'Artprice, détrônant les Etats-Unis et la  Grande-Bretagne qui dominaient le marché depuis 50 ans. Cette même année, dans  le top 10 des artistes mondiaux en termes de produit de ventes annuel, figurent  quatre Chinois. Parmi eux, Qi Baishi (1864-1957), dont une des oeuvres a battu ce 22 mai le record mondial de vente  pour une peinture contemporaine chinoise, est révélateur de la nouvelle place de  la Chine.   
Le marché de l'art Chinois en chiffres
4 artistes Chinois dans le top 10 des artistes mondiaux (en  terme de produit de ventes annuel), selon Artprice.  
33% des recettes mondiales du marché des enchères de l'art,  contre 30% pour les Etats-Unis, selon Artprice.  
46,5 millions d'euros pour une peinture de Qi Baishi  (1864-1957), le 22 mai à Pékin.  
Gérard Sousi, universitaire fondateur de  l'association Art et Droit,  souligne cependant que ces chiffres sont à relativiser: "Artprice ne  comptabilise que les ventes aux enchères de Fine Art (peinture, installation,  sculpture, dessin, photographie, estampe), le reste du marché est très opaque".  Il y a également un manque de transparence de la part du gouvernement chinois:  "On peut craindre que les chiffres communiqués soient biaisés". Mais au-delà de  ces précautions, l'évolution est réelle. Facteurs économiques, socio-culturels,  juridiques, Gérard Sousi apporte des clés d'analyse.  
Une première explication est à trouver dans la bonne santé de l'économie  chinoise. "On observe un lien évident entre le marché de l'art et la croissance  économique", analyse l'universitaire. Or, le PIB chinois se porte bien. Il a été  peu touché par la crise, contrairement aux Etats-Unis ou à l'Europe, et atteint  10% en 2010. Les 2000 milliardaires (en Yuan) Chinois représentent autant  d'acheteurs et collectionneurs potentiels: "Pour les nouveaux riches, l'arrivée  sur le marché de l'art est vue comme un acte de spéculation".   
"on observe un lien évident entre le marché de l'art et la croissance  économique"  
Un autre argument économique réside dans l'intérêt, pour des spéculateurs  internationaux, d'acheter des oeuvres d'art chinoises afin de diversifier  l'origine des acquisitions et de diviser les risques. A l'heure actuelle, il  semble qu'il faille, comme le suggère M. Sousi, "avoir du Chinois dans son  portefeuille"...  
L'identité socio-culturelle de la Chine est également un facteur favorisant  l'essor d'un marché de l'art florissant. Le nationalisme est exacerbé: "Des  mécènes chinois auront tendance à soutenir des artistes chinois", et un  phénomène d'émulation sociale s'observe également: "c'est à celui qui achètera  le plus et le mieux [...] 'J'achète cher, donc je suis' est un crédo très  répandu...". Enfin, la libération politique, même si elle reste relative, a  favorisé une création pléthorique, qui est clairement identifiée à l'étranger.  Le gouvernement a également une politique culturelle qui favorise l'intérêt  artistique: "aujourd'hui, la plupart des musées sont gratuits en Chine".   
"Il faut avoir du chinois dans son portefeuille".   
D'un point de vue juridique, des mesures protectionnistes favorisent les  oeuvres nationales. "Il y a une taxe à l'importation des produits de 33%, qui  favorise l'achat national. Les maisons de vente d'art internationales sont même  interdites de vente en Chine! Elles sont toutefois présentes à Hong Kong"  rappelle Gérard Sousi. Pour l'heure, l'absence de règles juridiques nationales  constitue, paradoxalement, un atout: la dynamique commerciale économique n'est  pas entravée par une réglementation. "L'art est dans le package de l'exportation  des biens chinois".   
L'art Chinois est donc "à la mode". Et au vu de l'économie mondiale, on peut  penser que la tendance sera plus que saisonnière.   
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